Hommage à mon père, mon héros

Thierry Santime
4 min readAug 18, 2021

Cette année, à l’occasion de l’anniversaire de mon père, j’ai voulu lui rendre hommage à travers ces quelques lignes. Le texte ci-dessous date du 30 Juin 2021, jour anniversaire de sa naissance. Avec son autorisation, j’ai décidé de publier ce texte sur ce blog. En publiant aujourd’hui 18 août 2021 ce texte dans lequel je rends notamment hommage à sa passion, son dévouement et son sens élevé d’altruisme au service des plus vulnérables, j’ai aussi une pensée pieuse en mémoire du Dr Ousmane Touré, jeune médecin guinéen qui a tragiquement perdu la vie suite au séisme qui a frappé Haïti le 14 août dernier, alors qu’il y était déployé pour le compte de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) dans le cadre de la riposte face à la COVID-19.

****** Texte original (daté du 30 Juin 2021)

Lorsqu’il y a quelques jours, j’ai appris la nouvelle de l’assassinat de trois travailleurs de Médecins sans Frontières (MSF) dans la région du Tigré en Éthiopie, j’ai pensé à tous ces travailleurs humanitaires dévoués qui ne ménagent aucun effort pour apporter un secours à des populations vulnérables, souvent dans des contextes très difficiles. J’ai aussi pensé à mon père. Oui, mon père, car cet homme a eu à travailler avec dévouement, professionnalisme, intégrité et résilience dans des contextes ou lieux d’affectation difficiles, à risque.

Mon père a eu son tout premier contrat « fixed term » avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en 1996 à Kinshasa. Depuis, il a effectué toute sa carrière au sein de cette Organisation. En 2005, il a entamé une carrière internationale qui l’a conduit à travailler dans plusieurs pays de la région africaine de l’OMS.

Souvent, j’entends des gens laisser entendre que la plupart des fonctionnaires internationaux, diplomates ou travailleurs humanitaires sont simplement intéressés par le lucre, le prestige ou les avantages venant avec ces fonctions et qu’ils n’apporteraient pas grand-chose pour le développement des pays où ils sont implantés. S’il est vrai qu’il y a bien des choses à revoir et des abus à corriger, je m’inscris résolument en faux contre cette tendance qui consiste à jeter le bébé avec l’eau du bain, à faire des généralisations excessives. J’ai eu la chance de rencontrer plusieurs personnes passionnées, dévouées et intègres qui œuvrent à soutenir les efforts de développement des pays -évidemment à la limite de leurs moyens et cadre d’intervention-, consentant parfois des sacrifices importants et mon père fait partie de ce lot. En tant que chargé des opérations à l’OMS, mon père a eu à contribuer aux efforts de lutte contre des crises sanitaires majeures comme la poliomyélite au Tchad et au Cameroun, la maladie à virus Ebola en Guinée et en RDC, la poliomyélite et la Covid-19 en République centrafricaine (RCA), pour ne citer que ces quelques cas. Être déployé dans la « ville martyre » de Beni au Nord-Kivu pour la riposte à Ebola ou encore être affecté à Bangui, où la situation sécuritaire laisse à désirer mais garder la même passion, la même volonté de bien faire, le même renoncement de soi, c’est ce qui me fascine et inspire chez cet homme que j’ai la chance d’avoir comme père. Bien souvent, ce n’est en effet pas une partie de plaisir ou une douce “farniente” lorsqu’on se retrouve dans de tels environnements sécuritaires volatiles comme fonctionnaire international ou travailleur humanitaire. On est parfois ciblé, même lorsqu’on a les meilleures intentions du monde et la volonté de contribuer positivement à l’amélioration des conditions de vie des populations. C’est malheureusement ce qui est arrivé à un ancien collègue à mon père, le Dr Richard Mouzoko, épidémiologiste camerounais de l’OMS assassiné en avril 2019 dans une attaque d’hommes armés à Butembo, dans l’est de la RDC où il était déployé dans le cadre de la riposte à l’épidémie d’Ébola.

J’ai vu, des années durant, à quel point mon père a consenti des sacrifices et a travaillé d’arrache-pied, avec passion et humilité, avec rigueur et empathie, avec ardeur et placidité, même lorsque le stress associé à des contextes et défis très difficiles aurait pu faire flancher. Et il poursuit encore cette mission avec le même élan. C’est toujours avec fierté et gratitude que je reçois les bons mots, les beaux témoignages des collègues ou ex-collègues à mon père.

Ce petit hommage à mon père, ce jour de son anniversaire, je l’adresse aussi à toutes ces femmes et tous ces hommes qui consacrent leur énergie, intelligence et savoir-faire au service du travail humanitaire ou dans le cadre d’une organisation internationale et ce, dans un esprit d’ouverture à l’autre, d’empathie, de respect et de mise en pratique des principes d’éthique professionnelle.

Papa, je veux te redire toute ma fierté et toute mon affection. Merci d’être un père qui coche toutes les cases de ses devoirs professionnels mais aussi familiaux.

Je souhaite que, dans quelques années, après une longue et brillante carrière, tu puisses jouir d’une retraite des plus paisibles et plaisantes.

Joyeux anniversaire!

Thierry

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Thierry Santime

Policy analyst. Diplomé de la maîtrise en Affaires publiques et internationales,Université d’Ottawa et du Bsc en Economie et politique,Université de Montréal.